Pas de grandes résolutions ni de bilan, 2004 aura été agréablement plate et gentiment vide -- non que je m'en plaigne. A la pensée de toutes ces nuits de nouvel an où j'aurais volontiers sauté du grand plongeoir directement sur le béton d'une piscine vide (c'est ballardien cette image -- post apo déjanté d'une jungle envahissant les villes, hum) si j'avais eu le plongeoir sous les pieds -- ici j'insère une pause-aide-mémoire au sujet de toutes ces nuits passées auxquelles je vais échapper ce soir, j'ai envie que ça devienne une habitude [aide-mémoire] Que préfères-tu ? La nuit où l'amour de ta vie t'a quittée et pendant laquelle tu as perdu tes lentilles dans les cendres de la cheminée de Marc, ou bien celle où tu t'es retrouvée coincée sans électricité dans le Périgord avec une belle-mère psychopathe, ou encore celle où pleine lune oblige tu as inventé le rituel le plus compliqué du monde qui faisait intervenir ton sang, des bougies modelées de tes mains, une marmotte en peluche, des photos, une corde invisible et un foulard en soie, ou bien, et c'est peut-être ta préférée, la nuit où tu t'es retrouvée coincée sur la place du village de V., avec un dj dont la grand-mère n'aurait pas dû épouser un si proche cousin, à danser sur Indochine en combi de ski tout en matant du coin de l'oeil ton ex pendue au téléphone avec celle pour qui elle t'avait quittée ? [/aide-mémoire] et fin de la pause -- à cette pensée donc je me sens submergée par un puissant flux de sérénité : ancrée, centrée, les épaules basses, le cou dégagée et la respiration abdominale libre.

Ce sera... ce que j'en ferai, je n'attends rien, ne pas *vivre* me convient très bien quand bien même, à l'occasion mais pas plus de deux fois par semaine, je me surprends à soupirer après un hypothétique renouement avec une quelconque forme d'ouverture à la vie.

Vouaip. Pas évident de se concentrer sur son futur en un lieu que j'aime et auquel je suis attachée par une multitude de racines, grandes et petites, submergée par un passé qu'à l'occasion j'aime à évoquer et que je retrouve parfois en rêve, que je n'évoquerai pas ici parce que les chiottes du quatrième étage de Paris III ça ne dit rien à personne et c'est tout de même assez vide en images poétiques (ceci dit, le soleil sur le blanc du carrelage, mmm...).

Et la respiration suspendue une fraction de seconde, comme lorsqu'on tire l'encre de sa plume en une ascendante absolument parfaite -- petite épiphanie gestuelle -- et qu'on se retrouve projeté en un indicible ailleurs, avant de laisser le souffle s'apaiser de nouveau, je vais me contenter de profiter de cet hic et nunc : béni soit ce temps, béni soit ce lieu et que la Très Sainte dérision toujours nous protège.